Ces outils législatifs qui manquent pour tous les Luxfer de France

Texte intégral de l'intervention prévue le 25 juin 2020 devant Luxfer à Gerzat.



  Bonjour à tous,

 Je commencerai bien sûr par redire combien nous avons de l’admiration, et de la reconnaissance, pour le courage des salariés de Luxfer et de leurs représentants syndicaux. 
 Depuis l’annonce de fermeture du site par leurs dirigeants le 26 novembre 2018, ils n’ont jamais lâché. 

 Ils n’ont surtout, surtout, jamais lâché sur l’ambition du maintien et du redémarrage de leur usine. 
 Nous savons, malheureusement par expérience, combien ce combat est dur, quand c’est le licenciement qui vous tombe sur la tête, quand c’est son avenir personnel, familial qui est en jeu. 

 Si nous sommes là aujourd’hui, avec cette mobilisation de grande ampleur, et surtout, surtout, avec un outil industriel près à être utile au pays en pleine crise sanitaire, c’est grâce à cette abnégation, ce sens collectif de la lutte, et l’engagement total des délégués syndicaux.

 Cela me faire dire d’ailleurs que la ténacité et l’abnégation,  la capacité à savoir affronter dans la durée les vents contraires, sont des vertus tout aussi essentielles dans la lutte syndicale que dans la lutte politique. 

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 Je voudrais simplement rappeler que l’action des militants et des élus communistes aux côtés des salariés, elle est là pour soutenir et accompagner au mieux leurs initiatives. 
 Elle vaut du niveau local jusqu’au niveau national. 
 Depuis Marie-Thérèse Ramonat, notre élue municipale de Gerzat ici, qui la première, a relayé l’alerte, jusqu’à nos parlementaires à l’Assemblée ou au Sénat qui doivent proposer des solutions politiques et des lois de progrès social et économique.

 A chaque fois, nous avons le souci, dans nos interventions, d’être utiles, et d’être des relais les plus efficaces possibles pour les salariés, pour leur combat, d’agir avec humilité, parfois même discrétion, sans jamais préempter sur les choix qu’il font pour aboutir.
 
 C’est très important. 

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 Je veux ensuite saluer le choix d’élargir cette manifestation à la défense globale de tous nos sites et outils industriels menacés, et à notre politique industrielle. 

 Car Luxfer, c’est devenu au fil des mois, et plus encore avec la crise sanitaire, un symbole national supplémentaire de l’hypocrisie et des abandons en matière de politique industrielle

 Abandons, parce que la liste des secteurs industriels délaissés depuis 30 ans est tellement longue, que tous les besoins les plus fondamentaux pour la population sont concernés. 

 Hypocrisie, parce que tous les « sans-gêne libéraux » continuent d’écumer les plateaux télés, en faisant mine de découvrir l’ampleur du désastre, que nous manquons de tout : de matériel médical bien sûr,  mais de molécules et de matériaux de base, d’outils de transformation et de maîtrise de toute la chaîne de production et de valeur… Comme on dit, « Ils ont la queue du renard qui leur sort de la gueule, et ils disent qu’il ne l’ont pas croquée » !

 Oui, nous avons besoin de reconstruire une grande stratégie industrielle nationale et européenne ! Secteur par secteur, besoins prioritaires par besoins prioritaires… sans quoi ce sont les seules logiques de profits qui seules continueront de guider la destinée de tous nos outils industriels nationaux. 

 Produire français, relocaliser et maîtriser nos outils industriels, cela fait partie de notre ADN de communistes. 
 Et nous n’avons jamais cédé sur ce point. 
 Ni aux tentations de la facilité. 
 Ni aux abandons en rase campagne. 
 Et il faut le dire, nous en avons entendus quelques-unes sur le sujet ces dernières décennies. 
 N’ayons pas peur de la dire, à droite souvent, mais aussi parfois à gauche ! 

 Combien de fois nous a-t-on expliqué que le secteur tertiaire, les services et les nouvelles technologies étaient les seules priorités ? 

 Qu’il était même bon pour l’économie de se séparer au plus vite des productions « de base ». 

 Combien de fois avons-nous entendus aussi que les communistes, ou les cégétistes, étaient de dangereux protectionnistes, voire, qualificatif plus moderne sans doute, de dangereux productivistes ! 
 On voit le résultat aujourd’hui. 
 Mais nous sommes prêts à vacciner tout le monde contre ce virus-là ! 
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 Reconstruire notre stratégie industrielle, c’est indispensable pour assurer la défense de nos outils industriels et assurer leur réorientation en lien direct avec la révolution écologique que nous devons opérer, et avec la révolution numérique qui bouleverse les modes de production.

 Cela suppose déjà d’avoir un Ministère qui s’y consacre ! 
 Je rappelle, pour ceux qui ne s’en seraient pas rendu compte, que depuis 2017, avec cette majorité En Marche, et c’est une première depuis 1945, il n'y a tout simplement plus de Ministre et de ministère chargé de l'Industrie
 Y a-t-il meilleur révélateur de l’abandon de notre politique industrielle aux forces de l’argent que celui-ci ?
 
 Affirmons-le donc d’abord, l'industrie ne se gère pas à Bercy ! Il faut un Ministre de l’Industrie.

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 Pour nous, après la définition de notre stratégie industrielle, la priorité politique, c’est de redonner à notre pays, dans notre législation, des leviers et des outils d’intervention efficaces, et qui nous manquent terriblement aujourd’hui : 
- des pôles industriels publics sur les secteurs stratégiques, 
- des droits nouveaux pour les salariés
- des outils juridiques pour les reprises de site et d’entreprise
- des outils d’accompagnement publics, bancaires et financiers pour ces reprises. 

 Tout le contraire de la soumission à la loi de l’actionnariat. 
 Tout le contraire de l’affaiblissement des droits dans l’entreprise que nous avons connu avec les lois Travail successives. 

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 Je terminerai pour illustrer ces propositions par l’exemple des débats sur la loi Florange en 2013 et 2014 (débats sur la loi dite de « sécurisation de l’emploi » du 14 juin 2013 et de la loi du 29 mars 2014 "visant à reconquérir l'économie réelle").
 Nos parlementaires communistes à l’Assemblée et au Sénat avaient dit et redit que son contenu était très insuffisant. 

 Ils avaient défendu pied à pied :
- qu’il fallait prévoir des droits d’intervention nouveaux pour les salariés, des droits pour permettre de suspendre les projets de plans sociaux et de cessions de site sans justification économique, mais aussi des droits nouveaux de réorientation des productions dans les conseils d’administration des groupes,
- qu’il fallait assurer un droit prioritaire de reprise de site ou d’entreprise par les salariés (et pas seulement la recherche d’un reprenuer par les groupes)
- qu’il fallait introduire dans la loi, très concrètement les modalités de l’accompagnement public, bancaire et financier de ce droit de reprise par les salariés (avec la sécurisation de l’emploi et la formation). 

  La déclinaison législative de certaines de ces propositions ont été reprises dans plusieurs de nos propositions de loi :







 Mais ces outils très concrets que nos élus avaient défendu, ils nous manquent aujourd’hui pour tous les Luxfer de France !
 
 Ils nous manquent pour agir efficacement et avoir y compris de vrais moyens de pression pour faciliter les reprises

 Ils nous manquent pour agir concrètement en faveur de notre industrie. 

 Au-delà du soutien permanent aux luttes, le PCF, ses militants et ses élus continueront donc d’être tenaces sur ces propositions politiques prioritaires pour l’avenir de notre industrie. 
 
 Longue vie à Luxfer !



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