120 euros mensuels supplémentaires en moyenne pour les retraités agricoles à carrière complète : voté. Pour les retraités actuels comme pour les futurs retraités. Si l’adoption aujourd’hui par les députés de la proposition de loi Chassaigne - Bello visant à revaloriser les pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les Outre-mer provoque chez moi de l'émotion, c'est parce que derrière le travail acharné de parlementaire d’André sur cette avancée sociale enfin en passe d’être concrétisée, se cache une histoire toute personnelle.
C'est en effet un des premiers sujets, et la première proposition de loi (extension du RCO à l’époque) sur laquelle il m'avait demandé de travailler, lorsque j'étais devenu, au tout début de 2008, assistant parlementaire. Je ne connaissais alors presque rien au sujet. Mais les premiers contacts que j’avais eu avec les représentants de l’Association Départementale des Retraités Agricoles du Puy-de-Dôme (ADRA 63) - avec le franc-parler du camarade Paul Philippe alors Président de l’association - m'avaient vite mis dans le bain. Je crois que c'était à la salle des fêtes de Saint-Dier d’Auvergne…
Dossier JB028, c'est inscrit sur mon tableau Excel. Trois boîtes d'archives complètes intitulées "Retraites agricoles" et "Retraites agricoles (suite 1 et suite 2)". Je n’ai jamais été un spécialiste du classement. Mais l’épaisseur des documents qui y sont stockés témoigne d’une injustice qui dure, et d’une bataille de longue haleine…
Il y a de l'émotion à voir qu'il nous aura fallu tout ce temps, 12 ans, de réunion locale en réunion locale avec les retraités agricoles et les agriculteurs, toute cette abnégation, ce travail parlementaire et de conviction, pour arracher une avancée un tant soit peu conséquente. Une avancée certes insuffisante, certes modeste, mais qui sera sans doute une des seules avancées sociales de cette législature.
Bien sûr, nous aurions préféré que cette avancée concerne l’ensemble des femmes, conjointes et aides familiaux de l’agriculture qui touchent les pensions les plus faibles. Et « faible » est un grand mot quand on parle au mieux de quelques centaines d’euros - 300, 400 ou 500 euros mensuels - le plus souvent. Nous continuerons à travailler pour que justice leur soit faite.
Bien sûr, nous préférerions que les revenus des agriculteurs, les prix auxquels ils vendent leurs productions, leur permettent de vivre de leur travail et de pouvoir mieux cotiser pour une meilleure retraite. Ce n’est toujours pas le cas et nous continuerons de travailler, comme nous le faisons depuis longtemps, en ce sens.
Bien sûr, nous aurions préféré que notre proposition de prélèvement sur les revenus financiers des géants de l’agroalimentaire et la distribution, ou sur les transactions financières, serve à financer la solidarité nationale et la protection sociale des paysans. Ce ne sera pas le cas. Mais nous continuerons à travailler en ce sens, pour que les revenus financiers, ces centaines de milliards de dividendes et placements spéculatifs qui abîment tant notre pays, soient justement mis à contribution.
Bien sûr, nous aurions préféré que la mise en œuvre de cette avancée soit immédiate, dès le 1er janvier 2021, et non repoussée au 1er janvier 2022 comme l’a fait la majorité En Marche (alors même que le Président de la MSA avait assuré de sa faisabilité technique dès 2021), et de la même façon, qu’il n’y ait pas d’écrêtement prenant en compte les autres pensions. Nous y travaillerons encore, avec nos sénateurs communistes notamment, lors de la prochaine lecture au Sénat qui aura lieu avant la fin juin.
Mais face à l'ampleur de l'injustice et des souffrances du quotidien qui leur ont été faites depuis tant d'années, je ne peux m'empêcher de penser à la réaction des 200 000 retraités concernés, peut-être surprise, peut-être heureuse, peut-être aussi anxieuse pour certains, à la vue de la hausse de leur pension qui devrait être effective à la fin de janvier 2022. La modestie de beaucoup leur fera même sans doute penser à une erreur de la MSA qu'il faudrait rembourser...
Émotion surtout, parce que tant d'entre nous sont des fils-filles, petit(e)s fils-filles de paysans. Je pense ainsi en écrivant ces lignes à mes grands-parents qui avaient tous les pieds dans la terre, à tous les retraités agricoles que je connais, et à tous mes amis agriculteurs qui le seront un jour. Ils nous ont nourris. Ils nous nourrissent. Ils nous nourriront demain. Le combat pour une retraite digne pour tous, et une protection sociale agricole de haut niveau continue. Nous ne lâcherons pas.
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