G7 de Biarritz : un sommet au service du multilatéralisme ? La bonne blague !



  Décidément, le Président de la République française est passé maître dans un domaine : nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Alors que les 7 mercenaires historiques du capitalisme mondialisé sont en route pour Biarritz, les éléments de communication présentés par Emmanuel Macron ne laissent pas de place au doute : il faut montrer que sous présidence française, ce sommet est un acte de relance du multilatéralisme et que l’on parlera librement de tout ce qui préoccupe le grand monde… mais d’abord « des grands sujets stratégiques de sécurité, de commerce et d’économie mondiale ». Et surtout dans l’entre-soi des vieux centres du capitalisme… mâtinés d’ouverture aux autres, avec quelques pays invités aux côtés de délégations formelles des organisations internationales. 

  Car Macron le sait, qu’est-ce que l’histoire du G5, G6, G7 (G8), si ce n’est d’abord une réaction à la construction progressive d’un droit international, de relations politiques d’égal à égal entre Etats du monde, de normes et de moyens d’intervention multilatéraux par un système certes très imparfait mais existant, celui des Nations-Unies, en particulier via son Assemblée générale, ses programmes et institutions spécialisées ? 
  La présentation de ce sommet par le Président de la République me fait d’ailleurs penser à la fameuse formule de Nicolas Sarkozy dans son discours de Toulon en 2008 qui s’était subitement lancé dans une croisade éthique pour « moraliser le capitalisme ». Voilà que le Président Macron semble vouloir « multilatéraliser le G7 ». Pas de doute, en termes de communication politique, nos Présidents successifs sont des convertis à la transsubstantiation catholique ! Et Emmanuel Macron veut désormais faire croire à la transformation du pain et du vin du G7 en corps de la diplomatie mondiale et de la coopération multilatérale !

  Mais en vérité, qu’y a t-il de plus anti-multilatéral, de plus anti-représentatif et de plus fermé politiquement qu’un tel sommet, préparé, organisé et cadré sur les « sujets » qui préoccupent les 7 ? 
  Tout le travail préparatoire (et il mobilise beaucoup de monde !) consiste donc à s’en défendre vigoureusement. L’Elysée et le Quai d’Orsay ont concentré beaucoup de leurs efforts sur le ripolinage sémantique. Grâce au G7 de Biarritz, ils veulent ainsi « lutter contre les inégalités » « aujourd’hui intolérables » (elles l’étaient donc moins hier ?), en « s’attaquant aux racines du mal » (si, si, c'est dans le texte) et « en renouvelant profondément le G7 2019 […] votre G7 » (just be a part of it) ! 
  Et cela continue avec la liste des 8 pays invités à participer au bal : 4 États, l’Inde, l’Australie, le Chili et l’Afrique du Sud au titre de « grandes démocraties » ayant une « influence régionale majeure » et « engagés dans la protection et la promotion des libertés démocratiques », aux côtés de 4 Etats africains, le Burkina Faso, l'Égypte, le Sénégal et le Rwanda qualifiés de « partenaires africains pour bâtir un partenariat renouvelé […] d'égal à égal avec ce continent d'avenir ». Comme toutes ces choses-là sont joliment dites non ?


  
  A la veille de son ouverture, je n’ai donc plus aucun doute sur le cœur des échanges de ce G7. Avec tout ce multilatéralisme, et toute cette démocratie sommitale, nous serons bien sur le fond de la résolution des inégalités mondiales avec : 
- la nécessité de reprendre le pouvoir sur les 500 plus grandes sociétés transcontinentales qui contrôlent plus de la moitié des richesses créées sur la planète et sont responsables de plus de 70 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre,
- la lutte sans merci à conduire contre l’accaparement des richesses d’une poignée de multimilliardaires au service de la redistribution mondiale et de la résorption de la pauvreté, 
- l’arrêt de la folle course à la consommation de ressources naturelles et énergétiques nécessaires aux générations futures qui font aujourd’hui le sel du capitalisme prédateur,
- la sortie immédiate de l’agriculture et de l’alimentation de la folie du libre-échange mondial et le soutien aux politiques publiques nationales et régionales des pays du Sud dans ce secteur, 
- voir même les conditions réelles de la relance du multilatéralisme avec le renforcement et la démocratisation du cadre onusien, avec de nouveaux moyens financiers et humains au service de la paix, du respect des droits de l’homme et de l’atteinte des objectifs du Millénaire pour le Développement...

  A moins que tout cela ne soit qu’un emballage fumeux pour continuer de servir les vrais desseins de nos 7 mercenaires du néolibéralisme et de leur cour des miracles…


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