Dans le cadre de la préparation de notre 38ème congrès, et au-delà du travail sur le contenu des propositions politiques renouvelées que doit porter notre parti pour la période à venir, 3 enjeux me paraissent centraux dans le débat qui doit animer les communistes :
Retrouver une visibilité et une ambition politique nationale
Revenir sur les conséquences de nos orientations électorales de la dernière période est certes une nécessité. Elle ne doit cependant pas donner lieu à l’occasion de ce congrès, à une guerre de tranchée stérile sur les responsabilités de chacune et de chacun dans cet échec. En revanche, un constat semble très largement partagé et se dégager. Celui d’un affaiblissement très inquiétant de notre visibilité politique nationale au cours des dix dernières années et encore plus depuis 2017, clairement incompatible avec la volonté des militants de changer la vie, de changer le monde. Ne tournons pas autour du pot. Ce manque de visibilité est, pour une très large part, le résultat d’un choix interne : celui de ne pas présenter de candidat à l’élection présidentielle qui, à notre corps défendant, structure la vie politique de notre pays. Cette problématique me paraît donc absolument centrale pour un parti qui entend faire vivre sa réflexion et ses propositions, si utiles au regard du monde actuel.
Ce sujet doit donc être au cœur du débat de notre Congrès. D’abord parce qu’en 2022, cela fera 15 ans que les Françaises et les Français n’auront pas entendu la voix d’un candidat communiste lors de l’élection qui structure le champ politique. Presque une génération… cette même génération qui a pourtant le plus à subir les conséquences des politiques néolibérales ! Ensuite parce que tout prouve que lorsqu’on ne se met pas en condition de mettre en avant un-e candidat-e communiste, nous finissons par entériner le fait, a priori, de ne pas vouloir en présenter. Vouloir faire vivre ses idées, sans les rendre visibles dans le débat public national, voilà un choix qui paraît tout de même curieux… pour ne pas dire totalement schizophrénique.
C’est pourquoi notre Congrès doit d’ores et déjà construire la perspective d’une offre politique publique d’une ou plusieurs possibilités de candidatures communistes dans cette future échéance. Cela suppose de lever des réticences parfaitement factices comme celle, devenue redondante, selon laquelle nous ne disposerions pas d’une femme ou d’un homme « en capacité » de nous représenter. Là-aussi, cessons de nous cacher derrière notre petit doigt : notre parti peut compter, en réalité, sur plusieurs dizaines de camarades, élus nationaux et/ou locaux ou femmes et hommes en responsabilité dans les fédérations parfaitement « capables » d’incarner nos idées et nos propositions. Il nous appartient donc, dès ce Congrès et dans les mois qui suivront, de mettre en perspective ces militants selon des objectifs définis collectivement. Nous pouvons d’ailleurs avancer d’autant plus sereinement dans cette « incarnation » politique personnelle que notre parti fait partie des rares organisations dont les militants sont en quelque sorte « vaccinés » contre le mythe si tenace de « l’homme providentiel » !
Cette question me paraît d’autant plus centrale dans notre débat de Congrès, qu’elle est, de mon point de vue, une condition déterminante du renouveau de notre travail sur le contenu politique, comme de la (re)mise en dynamique de nos militants partout sur les territoires. Elle est également une condition essentielle d’une capacité retrouvée à peser sur les rassemblements à construire pour une gauche conquérante et à visée majoritaire. Elle le sera donc, dès demain, lors des échéances européennes et municipales.
Valoriser notre culture et notre pratique politiques
L’humilité, la sincérité et le désintéressement dans l’engagement constituent de mon point de vue l’immense qualité des militants communistes et de notre organisation. Cette « qualité » se matérialise très concrètement à travers une pratique politique singulière que l’on peut décrire autour de quelques mots simples. Rester au contact direct de nos concitoyens, au plus près de leur lieu de vie, grâce à une organisation politique implantée et structurée sur l’ensemble du territoire national. Etre à l’écoute des besoins qu’ils expriment. Ne pas agir en donneur de leçon, mais accompagner toutes les luttes sociales dans leur développement et pour leur réussite. Etre force d’explication et de compréhension du monde. Soulever à la fois les complexités, les difficultés et les « révolutions » nécessaires dans les réponses politiques à apporter aux grands enjeux de notre temps. Elaborer en commun des propositions politiques concrètes tout en accompagnant les femmes et les hommes dans leurs difficultés de vie. Chercher par tous les moyens à construire les rassemblements politiques les plus en capacité de concrétiser des mesures de transformation et d’avancées sociales.
Cette « plus value » des communistes, nous avons trop tendance à l’oublier, à ne pas la valoriser à sa juste mesure. Elle est constitutive de ce qu’est le PCF d’aujourd’hui. Elle fonde de mon point de vue, ce qui fait que notre parti n’est pas un parti comme les autres. Et qu’à ce titre, il est le parti du commun, le parti qui fait le choix de l’intelligence collective et de l’émancipation de chacun. Un parti qui rend chacun de ses adhérents plus libre et conscient dans sa vie, car porté par l’enrichissement d’un débat collectif et le plus respectueux possible entre ses militants. Dans un champ politique gangréné par les luttes de pouvoir individuelles et de conquête d’une notoriété (synonyme d’espace et d’influence individuels), si souvent déconnectés des convictions et des débats de fonds, notre « qualité collective » n’est pas anodine. Elle doit plus encore être un atout de notre renforcement militant.
Pour autant, cette force d’une culture empreinte d’humilité, de sincérité et de désintéressement, doit cesser de se transformer en point faible - voire en véritable « acte de contrition » ! - lorsqu’il s’agit de s’affirmer vis-à-vis du reste du champ politique. Je pense en particulier à notre positionnement à l’approche et dans le cadre des échéances électorales. L’effacement volontaire, si souvent constaté ces dernières années, et dont les motivations et justifications mériteraient d’être profondément analysées, est clairement contreproductif pour nos idées et nos propositions. Cet effacement volontaire est tout aussi contreproductif dans la perspective de construction de rassemblements électoraux porteurs de progrès et d’avancées concrètes.
Réaffirmons donc un premier principe. En tant que parti politique, nous avons vocation à nous présenter dans chaque échéance électorale et partout où nous avons des militants ou sympathisants en disponibilité pour défendre nos valeurs et nos propositions. Notre solide culture de respect et de la construction partagée avec les autres forces politiques et sociales de la gauche nous prémunit suffisamment contre les dérives nombrilistes sans que nous en rajoutions.
Osons davantage mettre en avant et valoriser notre culture et notre pratique politiques. Oui, nous incarnons « humanité, respect de la réflexion de chacun, et construction partagée ». N’est-ce pas d’abord ce dont notre société a besoin pour se construire un avenir de progrès social, écologique et démocratique ?
Se saisir vraiment des enjeux d’une communication renouvelée
Là-aussi, le constat d’une inefficacité et d’une inadaptation de certains de nos outils, moyens et stratégies de communication est assez largement partagé. Il mérite d’être interrogé sereinement dans l’optique de construire des réponses adaptées à cet enjeu politique incontournable pour une organisation politique du XXIème siècle.
Si « l’identification » de l’ensemble de nos propositions est nécessaire à travers des porte-parole bien identifiés, il faut aussi savoir tirer partie, dans le champ médiatique, de notre capacité à mettre en avant « nos spécialistes » en fonction des sujets abordés. Nous avons la chance de disposer de camarades, souvent en responsabilité dans leurs fédérations, qui ont approfondi et travaillé sur le fond des problématiques spécifiques. Valorisons cette force collective, cette pluralité des savoirs, en les mobilisant au niveau national dès lors que ces sujets font l’actualité plutôt que de privilégier une communication trop souvent ressenti comme uniforme.
Un autre enjeu concerne l’appropriation d’un maximum de nos productions intellectuelles qui sont aujourd’hui non seulement d’une grande qualité, mais parmi les plus ouvertes sur les apports du champ scientifique et aux intellectuels (Ex-revue du projet devenue Cause commune, Progressistes, Economie et Politique… ; publications de nos secteurs). Fixons clairement des objectifs de diffusion de ces publications en interne en proposant aux communistes des modalités adaptées. Elles peuvent être mieux et bien plus des outils d’aide à la réflexion et à l’activité militante qu’elles ne le sont aujourd’hui. Utilisons aussi ces productions dans le débat d’idées public avec les nouveaux outils de communication que sont les réseaux sociaux.
Beaucoup de propositions de camarades sont aussi – enfin ! – mises sur la table pour que nous nous saisissions réellement des outils complémentaires à notre action militante de terrain que constituent les réseaux sociaux et outils de diffusion numérique. Cessons de sous-évaluer les effets d’une révolution numérique qui doit mieux servir à l’accès et à la diffusion de notre travail.
Julien Brugerolles
Secrétaire de section
Membre du Secrétariat du PCF63
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